En règle générale, le luddisme peut désigner deux phénomènes. Premièrement, une révolte parmi les travailleurs des régions industrielles du Royaume-Uni entre 1811 et 1817, et dont un des principaux moyens d’action a été la destruction de machines. Deuxièmement, par extension, une attitude parmi des travailleurs à l’égard du changement technologique qui consiste à détruire les manifestations concrètes de ce changement. Cette deuxième interprétation a fait que « luddite » est devenu dans le sens commun une épithète insultante pour désigner une opposition irrationnelle progrès, au changement technologique, sinon à la technologie de façon générale.

Dans cette présentation je reviendrai sur le luddisme historique et comment celui-ci peut permettre de comprendre l’attitude des travailleurs à l’égard du changement technologique. Pour cela, je reviens dans une première partie sur le mouvement luddite au XIXe siècle et ses trois composantes géographiques et professionnelles (tisserands bonnetiers du Lancashire, tondeurs du Yorkshire et tricoteurs de Nottingham). On verra ici que la question du bris de machines dépasse la simple question du changement technologique et qu’elle s’inscrit dans le contexte de la société britannique de l’époque. Dans une deuxième partie, je reviendrai sur les interprétations classiques du luddisme, notamment celles d’Eric Hobsbawm et de Edward P. Thompson,. Ces interprétations, montrent notamment que le luddisme peut être compris comme un mouvement « de transition » d’une société basée sur la communauté morale à une société industrielle et marchande. Enfin, dans une troisième partie, je reviendrai sur les débats historiques sur le luddisme afin de tirer des conclusions sur l’attitude des travailleurs à l’égard du changement technologique.